« Les Damnés de la Terre » Fanon est bien plus qu'un livre : c'est un plaidoyer stimulant pour les consciences, un atlas de la décolonisation écrit avec la force de la chair et du feu. Franz Fanon mérite une place de choix dans votre bibliothèque. Un manifeste pour la lutte anticoloniale, des essais sur l'ethnopsychiatrie, un ouvrage sur les mécanismes de l'oppression politique…
Le Moi est fiction : la narration comme acte d'existence
« Le moi est fiction . » Par cette affirmation provocatrice, Nancy Huston nous invite à reconsidérer l'un des concepts les plus profondément ancrés dans notre culture : l'identité personnelle. Dans son essai L'espèce fabulatrice (2008) , l'écrivaine franco-canadienne explore la nature narrative de l'être humain, soutenant que ce que nous appelons « le moi » n'est rien d'autre qu'une construction imaginaire, une histoire que nous nous racontons pour donner un sens à notre existence.
L'identité comme histoire
L'être humain est la seule espèce qui éprouve le besoin de raconter son histoire pour exister . Nous ne nous contentons pas de vivre : nous interprétons nos vies , nous les organisons en récits , nous leur donnons du sens . L'identité n'est pas un fait biologique ou psychologique, mais une œuvre narrative en perpétuelle réécriture .
Nous ne naissons pas avec une identité prédéfinie : nous la construisons jour après jour, en sélectionnant souvenirs, émotions et expériences. Chaque choix , chaque mot, chaque silence contribue à écrire le roman de notre identité . Mais comme tout roman, celui-ci est lui aussi partiel, subjectif et évolutif.
L'empathie comme réflexe
Huston observe qu'il est plus facile de voir le monde à travers le regard d'autrui qu'à travers le nôtre. Ce paradoxe révèle une vérité profonde : les autres nous apparaissent comme des figures préétablies, dotées de traits reconnaissables, de rôles sociaux et d'histoires que nous pouvons pressentir ou imaginer . Nous-mêmes, en revanche, demeurons une énigme en constante évolution .
Se comprendre soi-même exige un effort créatif. Il ne suffit pas de se regarder dans le miroir : il faut inventer un récit qui nous rende compréhensibles, avant tout à nous-mêmes. Ce récit ne consiste pas tant à s’identifier aux autres qu’à se reconnaître soi-même, à se donner un visage, une voix et une cohérence.

La littérature comme laboratoire du soi
La littérature n'est pas seulement un moyen d'échapper à la réalité, mais un outil pour l'explorer. Lire et écrire sont des actes profondément identitaires : ils nous permettent d'expérimenter d'autres facettes de nous-mêmes, d'explorer des possibilités qui, autrement, resteraient inexplorées.
Chaque personnage littéraire est un masque de l'ego, une tentative de répondre à la question : « Et si j'étais comme ça ? » La fiction devient alors un moyen de sonder l'authenticité, de tester les limites de l'identité, de découvrir qui nous sommes à travers ce que nous ne sommes pas .
Raconter son histoire n'est pas un luxe : c'est une nécessité. Car c'est seulement à travers la fiction que nous pouvons nous rapprocher de la vérité sur qui nous sommes.
Le pouvoir de la fiction
Affirmer que le moi est fiction ne signifie pas nier notre existence, mais plutôt reconnaître sa nature fluide, changeante et narrative. C'est une invitation à prendre la plume et à devenir les auteurs de notre propre histoire. Nous ne sommes pas prisonniers d'une identité immuable : nous sommes narrateurs et nous pouvons nous réécrire. La fiction n'est pas un mensonge : elle est possibilité . C'est l'espace où les êtres humains exercent leur liberté la plus profonde, celle de s'imaginer autrement, de se transformer, d'évoluer. Dans un monde qui nous impose souvent des rôles rigides et des identités préfabriquées, le récit est un acte de résistance et de création. Nancy Huston nous rappelle que l'identité n'est pas une essence à découvrir, mais une œuvre à composer. Le moi n'est pas un point de départ, mais un point d'arrivée . Il n'est pas une donnée, mais une tâche. Et dans cette tâche, le récit est notre outil le plus puissant. « Se raconter des histoires n'est pas un luxe : c'est une nécessité. Car c'est seulement à travers la fiction que nous pouvons approcher la vérité de qui nous sommes. »

AUTREMENT DIT
La narration comme fonction cognitive et culturelle : un nouveau paradigme interprétatif
Les récits sont omniprésents : ils imprègnent les bibliothèques et les archives numériques, habitent la mémoire des individus et des peuples, et façonnent l’imaginaire collectif et personnel. Pourtant, paradoxalement, alors même que le monde se trouve saturé d’histoires, l’analyse narrative semble traverser une crise profonde. Après l’ère de l’exégèse, des courants interprétatifs tels que le structuralisme, l’herméneutique, la psychanalyse, le féminisme et la déconstruction ont émergé – quelques exemples parmi les nombreuses écoles qui ont tenté de décrypter le phénomène narratif. Il en résulte une fragmentation théorique qui rend difficile, voire impossible, toute approche commune.
Dans ce contexte, il est nécessaire de repenser radicalement notre conception du récit. Après avoir passé en revue l'histoire de la narratologie classique et ses principaux auteurs, je propose un changement de perspective : considérer le récit non comme un simple art ou une technique, mais comme une fonction cognitive évolutive . Les sciences biologiques et neurobiologiques offrent des modèles qui nous permettent d'interpréter le récit comme un mécanisme neuronal fondamental par lequel le cerveau humain s'oriente dans le temps, organise les événements et donne sens à l'expérience.
Dans cette perspective, la narration n'est pas seulement un produit culturel, mais une stratégie cognitive qui nous permet de donner du sens aux fragments de nos vies. Elle transforme le chaos en ordre, l'événement en signification. Et il ne s'agit pas d'un processus passif : c'est un jeu cognitif actif , analysable à l'aide des modèles mathématiques de la théorie des jeux . Ainsi, les récits ne sont pas de simples reflets de la réalité, mais des outils évolutifs qui ont guidé la culture humaine vers des formes de coopération toujours plus complexes.
Quiconque a déjà pleuré devant un film, été transformé par un roman ou trouvé du réconfort dans une comédie a fait l'expérience du pouvoir des histoires. Elles nous nourrissent, nous façonnent et nous survivent. Nos vies elles-mêmes sont des récits, et elles n'ont de sens que dans la mesure où nous sommes capables de les raconter. Mais que se passe-t-il réellement dans notre cerveau lorsque nous vivons une histoire ? Comment fonctionne ce mystérieux mécanisme qui nous permet de donner une cohérence à nos expériences ?
Les récits peuvent inspirer, motiver, guérir – comme c’est le cas pour Sharāzād dans les Mille et Une Nuits – mais ils peuvent aussi détruire . Au nom de théories telles que la théorie raciale , la lutte des classes ou l’histoire du salut , des atrocités indicibles ont été perpétrées . Platon nous met en garde contre les mauvais récits , Aristote nous apprend à les discerner . Pendant des millénaires, les grands récits religieux et profanes se sont disputés le sens ultime de l’Histoire, jusqu’à la crise de la postmodernité, qui a remis en question la possibilité même d’un récit universel.
Le récit est inévitable . Il est inscrit dans notre langage, dans notre perception du temps, dans notre corporéité. Des peintures rupestres à la danse, de la tradition orale aux images numériques, les êtres humains ont toujours raconté des histoires. Et toute histoire est inévitablement partielle, artificielle, manipulée : si elle était pure, ce ne serait pas une histoire, mais la réalité. Le problème n’est pas de savoir si un récit est important ou juste, mais plutôt de comprendre son fonctionnement .
Le terme « narration » recouvre de multiples significations. La distinction traditionnelle entre narration et description, fondée sur la référence au temps, est insuffisante : les descriptions aussi narrent un temps, même si celui-ci est ralenti ou suspendu. Il est plus juste de comprendre la narration comme une fonction cognitive transversale , présente dans toutes les formes d’expérience humaine. Les distinctions entre fiction et reportage, entre spectateur et lecteur, ne nous permettent pas de saisir l’essence du phénomène narratif . Car ce qui importe, ce n’est pas le support , mais le processus mental qui nous permet de lui donner sens .
« Car ce qui nous intéresse, ce n'est pas la façon dont l'histoire est consommée, mais son impact sur l'esprit humain. Raconter des histoires n'est pas un luxe : c'est une nécessité. C'est ainsi que nous devenons humains. »
À PROPOS DE...
Paul Ricoeur et le récit : le fil qui tisse l'identité
Paul Ricoeur , l'un des philosophes les plus influents du XXe siècle, a consacré une grande partie de son œuvre à explorer les liens entre temps, identité et récit. Pour lui, raconter des histoires n'est pas un simple exercice créatif, mais un acte ontologique : c'est par le récit que les êtres humains façonnent leur existence et la rendent intelligible.
La narration comme tissage du temps
Ricoeur soutient que la narration nous permet d' entrelacer passé, présent et futur en un récit cohérent. Sans narration, le temps ne serait qu'une succession d'instants. Grâce à elle, le temps devient une expérience vécue , dotée de sens et de direction.
Le passé n'est pas seulement ce qui s'est passé, mais aussi ce qui est réinterprété.
Le présent n'est pas seulement ce que nous vivons, mais aussi ce que nous racontons.
L'avenir n'est pas seulement ce qui va arriver, mais aussi ce qui est imaginé et planifié.
L'identité narrative
concepts clés de Ricoeur est celui d' identité narrative . Le soi n'est pas une substance figée, mais un récit en devenir. Nous ne sommes pas ce que nous sommes, mais ce que nous disons être.
L'identité se construit au fil du temps, à travers les histoires que nous racontons de nous-mêmes et celles que les autres racontent de nous.
L'identité n'est jamais définitive : elle est toujours ouverte, révisable, transformable.
Raconter son histoire, c'est donner forme à son être , mais aussi se remettre en question .
La narration est le lieu où se négocie l'identité , entre mémoire et projet, entre loyauté et changement.
Au cœur même de l'ère numérique, où les algorithmes apprennent à une vitesse exponentielle et où l'intelligence artificielle s'insinue dans tous les aspects de la vie sociale, une voix s'élève, qui ne parle pas le langage du profit, mais celui de la dignité. C'est la voix de Paolo Benanti , franciscain du Tiers-Ordre régulier, théologien et professeur d'algorithmes…
Il existe une force mystérieuse qui transcende la matérialité de notre quotidien : la pensée. Silencieuse comme un souffle, la pensée se meut invisiblement, et pourtant sa présence est palpable, à l’instar de la chaleur qui réchauffe la peau ou du froid qui pique. C’est une énergie qui unit, persiste et voyage à travers les distances, surmontant…
La fonction éthique de la narration
Pour Ricoeur , la narration a aussi une fonction éthique. Raconter des histoires, c'est connecter à l'autre, créer des ponts de compréhension, susciter l'empathie. Les histoires nous permettent d' adopter le point de vue d'autrui , de reconnaître l'altérité, de construire une communauté.
Les récits personnels s'entremêlent aux récits collectifs.
Les histoires peuvent guérir, inspirer, transformer.
Mais ils peuvent aussi blesser, manipuler, détruire : d'où l'importance de juger les récits , comme l'enseignent Platon et Aristote.
Vivre de manière narrative
Ricoeur nous invite à vivre avec une conscience narrative : à reconnaître que chaque vie est une histoire en devenir, que nous pouvons réinterpréter le passé, réécrire le présent, imaginer l’avenir. Vivre de manière narrative, c’est habiter le temps intentionnellement , donner sens à l’expérience, choisir le cours de notre existence.
« Nous sommes les histoires que nous racontons la pensée de Ricoeur résonne comme une invitation à redécouvrir la continuité, l'authenticité et la transformation grâce au pouvoir des histoires.
Car ce qui nous intéresse, ce n'est pas la manière dont les histoires sont consommées, mais leur impact sur l'esprit humain. Raconter des histoires n'est pas un luxe : c'est une nécessité.
C'est ainsi que nous devenons humains.
Les histoires nous nourrissent, nous façonnent, nous survivent. Nos vies elles-mêmes sont des récits, et elles n'ont de sens que dans la mesure où nous sommes capables de les raconter.
C'è una tribù che infesta i nostri salotti e i social network, "una categoria dello spirito" che si nutre di contraddizione e rancore: i "comunisti senza Rolex". Non sono rivoluzionari, non sono idealisti, e nemmeno autentici difensori della giustizia sociale. Sono moralisti di professione, predicatori di un'etica che non nasce da convinzione, ma...
Chaque être humain naît immergé dans un océan de perceptions. La conscience est le premier rivage que nous touchons : un point d'appui fragile qui nous permet de dire « je » au monde. Mais la conscience n'est pas un point fixe : c'est un mouvement, un flux qui se renouvelle à chaque instant. C'est la capacité de reconnaître que nous sommes vivants et que…








